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2 mai 2011

Le père, à quoi ça sert ?

"LA VALEUR DU TRIANGLE PERE – MERE – ENFANT"

Simone et Moussa NABATI, Editions Jouvence

 

Livre résumé par Eric Breyton (Suisse) en 2004 dans le cadre de la formation à la relation d'aide avec Jacques Poujol.

 

Les auteurs :

 S. et M. Nabati sont un couple de psychanalystes, tous deux diplômés de l'Institut de Psychologie et docteurs en psychologie de l'Université de Paris. L'objectif qu'ils poursuivent ensemble depuis des années consiste à faire sortir la psychanalyse de son ghetto, pour la rendre accessible à tous.

 Leur devise : "comprendre, afin de pouvoir s'aider soi-même."

 

Présentation de l'ouvrage :

L'originalité de ce livre consiste dans le fait qu'il pourrait être l'objet de deux ouvrages distincts. En effet, il a été écrit par un couple qui abordent le sujet tantôt de façon très théorique, tantôt de façon beaucoup plus concrète.

La première partie, écrite par Moussa Nabati, met en évidence le rôle de notre culture judéo-chrétienne dans l'établissement de l'actuel triangle "père – mère – enfant". Argumentant ses dires par une interprétation personnelle, non sans intérêt, des textes bibliques, il cherche à démontrer que l'état actuel de ce triangle trouve ses racines dès l'origine des "patriarches".

Le mouvement féministe des années soixante-dix est pour lui, un autre axe de recherche à partir duquel il argumente de façon parfois assez violente, les propos qu'il veut mettre en évidence.

La deuxième partie est écrite par Simone Nabati. Les cent dernières années sont pour elle le terrain de recherche des causes du dysfonctionnement du triangle "père – mère – enfant". Plus actuel, plus concret, certains points de vue vont même à l'encontre de ce qui est suggéré en première partie, ce qui laisse au lecteur, tout loisir d'apprécier la démonstration qu'il fera sienne.

La conclusion est l'œuvre commune des deux auteurs, et laisse entrevoir ce qui semble se dessiner aujourd'hui quant à cette relation parfois difficile, mais dont il faut bien admettre qu'elle a, au fil des siècles, considérablement évolué sur le plan des comportements, mais n'a que peu changé quant à la manière de l'exprimer.

La question qu'ils posent en titre, semble trouver ici une réponse des plus cohérente, qu'il appartiendra à chacun de faire sienne.


 

D'un extrême à l'autre

L'auteur s'attache ici, à mettre en évidence les raisons qui déstabilisent le triangle relationnel "père - mère - enfant".

Les bouleversements dans la composition des familles, le rejet d'un "mauvais patriarcat" trop souvent synonyme de toute puissance, mais surtout le manque de réflexion dû à des changements trop rapides pour être analysés, sont à l'origine du fonctionnement, actuellement inadapté, du triangle "père - mère - enfant".

Le déclin du patriarcat (plus précisément d'un pseudo-patriarcat comme l'auteur le décrira plus loin) est une des raisons de ce grand bouleversement. Les patriarches qui régnaient en maître dans leur famille ont dû céder la place à une nouvelle forme d'autorité, beaucoup plus subtile, mais aussi beaucoup moins marquée. La famille qui voyait grandir sous le même toit jusqu'à trois, voire quatre générations simultanément, a littéralement explosé pour devenir monoparentale.

L'époque de la femme à la maison, devant son fourneau, image bien désuète de nos jours, a vu s'opérer un changement, en moins de deux générations, pour devenir l'époque de la femme dite "accomplie", de celle qui travaille à l'extérieur, et à temps complet de surcroît.

Qui assume donc les tâches ainsi "délaissées" ? Dans plus de quatre-vingt pour cent des cas, ce sont les mêmes que l'on retrouve ! La femme "moderne" n'a donc pas porté une casquette différente, mais une casquette supplémentaire !

Les droits individuels et collectifs sont venus remplacer les devoirs, jusqu'à les évincer de façon quasi systématique, et ce, au nom de ce qui pourrait sembler être la liberté aujourd'hui.

Un des domaines les plus marquants de ce changement concerne la sexualité, envisagée alors à travers le seul "devoir conjugal" qui, pour être bien vu, devait se résumer à la procréation (chaque coup au but !) et où toute recherche de plaisir et d'aventures plus pétillantes devenait le mal suprême, dénoncé par tous ; les superlatifs n'étant cependant pas forcément les mêmes, si l'on était un homme, ou une femme dans ce cas précis.

A succédé alors une époque, toujours actuelle, où le sexe constitue "un droit inaliénable comme manger, boire, ou dormir, passant par là-même, du puritanisme à la licence".

Ce qui devient alors le trop célèbre :

- "Je fais ce que je veux, comme je veux, où je veux, et avec qui je veux !".

L'auteur met ici en évidence que le problème ne réside pas dans le changement en lui-même, mais dans l'adaptation au changement qui a été négligée, creusant de ce fait l'écart entre le conscient, qui s'adapte (autre temps, autres mœurs), et l'inconscient incapable de suivre une adaptation aussi rapide. Le tout, sur fond de polémique attisée par les mouvements féministes.

 

M. Nabati propose à ce stade trois questions pour nous permettre d'y voir plus clair :

 

1- Aurait-on pu procéder à ce changement par étapes ?

2- Est-ce la faute des femmes ?

3- Doit-on effectuer un retour en arrière ?

 

La réponse se trouve dans l'équilibre à adopter entre "le septième ciel, et le septième sous-sol".

-   " Le changement fait partie de la vie, la stagnation propage la mort"

 

Le désir des unes, la puissance des autres : le bon complément

 

Une question se pose : Le patriarcat a t-il vraiment existé ?

 

L’auteur s’attache à mettre en évidence que le vrai patriarcat n’a pas encore eu cours, bien au contraire : En puisant dans nos racines judéo-chrétiennes, on constate que sous une apparence d’autorité régnait  un "matriarcat psychologique". La femme, bien que souvent placée en second plan est celle qui dirige réellement, l'homme n'étant que le bras armé de ses désirs.

 

En créant la femme en second, Dieu ferait-il preuve de misogynie divine ? L'hypothèse de l'auteur est que par là même, les hommes ne pourront dès lors pas prétendre qu'ils seraient issus de l'union entre Dieu et la femme. Dieu établit donc ici clairement et de façon radicale la rupture entre le divin et l'humain. Qui plus est : Avant la création de la femme, l'homme peut être considéré comme une sorte d'androgyne. L'homme n'a pas exprimé le besoin de la femme, Dieu seul précise :

 

-"Il n'est pas bon que l'homme soit seul…"

 

La femme inférieure à l'homme car créée en second ?

Dieu créa l'homme le sixième jour. Jour où il crée entre autre les animaux et  les bêtes sauvages ! L'homme demeure et restera d'essence "animale".

Au contraire, en étant "tiré" de l'homme, Eve apparaît clairement d'essence humaine. L'infériorité prétendue de la femme est alors mise à mal.

 

De par l'apparition de la femme, l'homme ne peut plus être considéré comme androgyne. C'est donc la femme qui lui permet à nouveau de trouver son identité sexuelle : le masculin

 

L'homme et la femme, loin d'être complémentaires, sont des êtres complets dès l'origine.

 

Beaucoup de divorces sont dus à une illusion par rapport à une union idéalisée de façon inconsciente, qui consiste à croire que le partenaire me permettra de trouver la pleine jouissance, l'entente parfaite qui supprimeraient le manque et l'insatisfaction. Cette aspiration démesurée à la fusion, rend de ce fait intolérant face à un conflit, considéré alors comme "anormal" dans le couple, et qu'il devient possible d'éviter par le moyen de la séparation ; avec de surcroît l'illusion inconsciente de retrouver l'harmonie parfaite ailleurs.

 

-" Non, l'homme et la femme ne se complètent point. Chacun révèle à l'autre, en cadeau de mariage, le manque, la faiblesse et la dépendance. L'amour ne libère pas. Il rend chacun dépendant."

 

Qu'en est-il du paradis perdu ? Est-ce la faute de la femme ?

 

Par une approche intéressante, l'auteur nous permet de mieux discerner qu'Eve n'est en rien une "coupable" de la déchéance de l'humanité, mais qu'au contraire son intervention voulue par Dieu permet à l'homme de sortir de la symbiose qui l'unissait à son Dieu.

 

Quand l'Eternel s'adresse à Adam : "Tous les arbres du jardin, tu peux en manger, etc…", la femme n'existe pas encore. Dieu part-il du présupposé qu'Adam aurait dû avertir Eve de ne pas faire ceci ou cela ? Nullement. La femme a t-elle reçu un interdit divin ? Non plus.

Sur les six cent treize commandements de Dieu aux hommes, pas un n'est adressé à la femme. Ce n'est pas la femme qui est maudite, mais le serpent.

 

Pourquoi dans le jardin Dieu s'adresse t-il à Adam par Ses ordonnances ? Pour l'éduquer, l'humaniser, en deux mots le "désanimaliser" !

 

Dieu a t-il été dépassé par les événements ?

Pourquoi, puisqu'il en a le pouvoir a t-il créé le serpent ? Ou l'arbre ?

 

Ces faits montrent que par là même la transgression était clairement programmée. Cette transgression est-elle mauvaise ?

Dieu n'exige pas (il aurait pu) une obéissance aveugle. Il aurait pu faire de nous des automates, des robots. Non, il a choisi de laisser la liberté aux hommes.

 

Sans cette transgression quelle aurait été la vie d'Adam et Eve ? A l'abri du Dieu infini, auraient-ils éprouvé des sentiments propres ? Auraient-ils pu éprouver la joie sans l'effort, la peur, ou l'angoisse ?

 

En transgressant l'interdit, Eve a signé l'acte de renaissance de l'humain. Grâce à ce courage, et non à cause de ce péché, ils sortirent de "l'utérus divin" pour enfin vivre leur vie d'homme, de femme, et de couple. Ils prirent conscience d'eux-mêmes, ET ils s'aimèrent.

 

L'ordre naturel pour l'homme est animal. Passer de l'ordre animal à l'univers humain constitue une transgression nécessaire. Vivre est un péché !

 

-"Car vivre c'est se séparer, partir, créer, refuser, décevoir, se révolter, afin de se bâtir un désir, une identité et un destin singulier, subjectif, intime, différent, personnel."

 

 

A travers trois matriarches Sarah, Rebecca et Rachel, l'auteur s'emploie à démontrer que les patriarches n'ont fait "qu'obéir" aux désirs sous-jacents de celles qui commandaient vraiment. Les actions effectuées, ou les décisions prises alors, n'étaient alors que la concrétisation, la mise en musique de désirs lourdement influencés par les paroles des matriarches :

 

Esaü et Jacob : Loin d'être dupe, Isaac bénit sciemment Jacob pour ne pas avoir à supporter la frustration de Rebecca, de qui Jacob est le préféré. Rebecca dira à Jacob :

-" Sois docile à ma voix", "Mon fils, obéis à ma voix"

 

A quoi Isaac répondra :

-" …La voix est la voix de Jacob, et les mains sont les mains d'Esaü".

 

Il est intéressant de noter que les trois matriarches ont d'abord été stériles. L'auteur souligne cette stérilité par une "masculinisation" trop développée. De par leur comportement, les matriarches étaient imbues d'elles-mêmes, autosuffisantes voulant arriver à leurs fins, quelque soient les méthodes employées. Le désir inconscient étant ici nommée "l'omnipotence parthénogénétique".

 

L'auteur montre par là l'importance du désir féminin dans notre héritage judéo-chrétien : Les patriarches s'occupaient "du dehors", en position de gloire et de puissance, combattaient l'ennemi, assuraient la survie à travers le bétail l'or et l'argent. Mais pour qui ? Leurs femmes !

Elles gouvernaient sur "le dedans", où elles dictaient leur désir.

 

Loin de voir un écrasement du patriarcat sur le matriarcat, on peut conclure qu'il s'agissait alors d'une véritable complémentarité dans l'égalité et la différenciation des fonctions, reconnues et partagées. L'autorité paternelle n'étant là que pour imposer une limite à la toute puissance du désir féminin.

 

Dans le cas des matriarches, c'est le triangle "Père – mère – Dieu" qui était instauré : L'enfant étant relégué à une position de chose ou d'objet.

 

L'homme-père : La mise en place du triangle

 

La question est donc posée : A quoi sert donc le père ? Bref retour en arrière avant l'analyse de la situation actuelle.

 

Les psychanalystes reconnaissent au père cinq fonctions principales :

 

La protection – L'éducation – L'initiation – La séparation – La filiation

 

L'auteur décrit pour chacune d'entre elles le paradoxe dont elles sont l'objet en tant que père

 

La protection :

 

L'homme est fort, par définition. Il lui revient donc le rôle d'assurer assistance et sécurité à sa communauté. Le paradoxe est bien là : Ce que la femme a assuré seule pendant les neufs premiers mois de grossesse, voilà que du jour au lendemain on demande à l'homme "d'entrer en fonction", sans autre forme de procès ! Y a t-il un homme à qui on n'est jamais appris à prendre soin des siens avant d'y être confronté ?

 

L'éducation :

 

Pour se construire, l'homme a besoin, dès son plus jeune âge d'apprendre que le monde n'a pas seulement été créé pour répondre à ses besoins, ses envies, et combler ses frustrations. Cette gestion des frustrations revient au père, lui, l'extérieur, celui qui tire "dehors".

 

Deuxième paradoxe : Psychologiquement, l'homme-père supporte beaucoup moins bien que la femme-mère, la frustration, la privation, bref,  le non accomplissement de ses désirs. L'accomplissement sexuel devient source de plaisir chez l'un, alors que c'est le plaisir qui conduira vers un épanouissement "éventuel" chez l'autre !

 

L'homme vit par et dans le besoin. La femme devient donc pour lui essentielle, incontournable.

La femme elle, vit par et dans le désir. Le besoin fondamental de l'homme n'est donc pas sous-jacent, il n'est en rien une nécessité fondamentale. Les remariages après décès sont beaucoup plus fréquents chez les veufs que chez les veuves. L'énurésie et les retards du langage sont aussi plus fréquents chez le petit garçon.

 

L'initiation :

 

"Tu n'es pas tout, homme et femme à la fois, grand et petit, jeune et vieux". L'homme-père aide l'enfant à se structurer dans un monde fait de repères, de limites, qu'il ne pourra franchir. Ces limites lui serviront alors de barrières entre lesquelles il apprendra à construire sa propre identité, ses propres différences, ce qui le rendra ce qu'il est, un être unique.

 

La frustration de donner la vie est bien celle du père ! C'est ce qui constitue le troisième paradoxe : Lui qui porte cette frustration (bien qu'inconsciente) , doit apprendre à un autre à la gérer ! Le trop grand cas qui est fait de la "petite fille qui veut avoir un pénis, comme papa" semble occulter, ou tout au moins passer sous silence, la blessure du petit garçon qui ne portera jamais la vie dans son ventre.

 

La séparation :

 

L'homme-père est ici considéré comme "l'empêcheur de jouir en rond", dans l'extase fusionnelle mère-enfant.

 

Son rôle de séparateur se joue dans les deux sens : la séparation mère-enfant, mais aussi la séparation enfant-mère.

 

Quatrième paradoxe : C'est bien la mère qui a commencé cette séparation lors de l'accouchement, après une période de fusion maximale lors de la grossesse, mais c'est au père que revient la tâche de l'achever.

 

Bien que ne pouvant pas faire l'expérience de l'accouchement, l'homme établit ses relations au monde par l'intermédiaire de son corps, de ses sens, des sensations physiques. L'acte qui, pour lui, représentera le plus parfaitement cette relation, ce don de soi, se trouve résumer dans l'acte d'amour qu'il partagera avec sa compagne. Ce langage, souvent incompris comme tel, ou en tout cas souvent interprété de façon péjorative, est véritablement celui qui surpasse toute parole, qui décrit le plus précisément, qui concrétise au mieux ce que des mots ne décrivent qu'imparfaitement : J'ai besoin de te toucher pour savoir que je t'aime.

 

Loin de ce schéma, la femme n'aura de cesse de mettre en œuvre des artifices qui n'auront pour unique but que de se rendre désirable, de se savoir aimer. Ce sentiment étant là une joie tout aussi intense qu'une relation intime à proprement parler.

 

L'homme, qui parle donc par ses sens, se doit de "séparer" une fusion qu'il ne peut sentir, palper, vivre !

 

La filiation :

 

L'homme n'aura jamais l'absolue certitude de sa paternité ! Et c'est à lui que revient le devoir de "donner son nom" à sa progéniture ; à lui de le faire entrer dans sa lignée, de l'intégrer à l'histoire de la famille. Le cinquième paradoxe est là bien présent.

 

Les tests génétiques, bien que possible aujourd'hui n'ont en rien changé la donne : Le lien biologique le plus solide, le plus sûr, ne pourra jamais faire passer un homme de son statut d'homme à un statut de père.

 

Seule la parole de la femme : " Il est de toi cet enfant", pourra légitimer le père dans son nouveau rôle. L'auteur dira :

 

-" Ce qui rend un homme père, c'est l'amour, la reconnaissance de sa femme…Le meilleur remède contre l'incertitude paternelle, c'est la certitude maternelle qu'elle n'a pas fait l'enfant toute seule…"

 

Pourquoi, étant si mal "équipé" au départ, demande t-on à l'homme de se charger de tâches si importantes, de si grandes conséquences pour la vie de "l'être cher" ? Alors que la femme semble beaucoup plus à même d'assumer ces responsabilités, demanderait-on quelque chose qui est contre-nature ? Non, la réponse est toute autre : On ne parle jamais mieux que de ce qu'on ne connaît pas. Celui qui connaît ne pourra conduire plus loin, ne pourra apprendre à aller au delà. Ce que l'auteur résume par cette phrase :

 

-" Psychologiquement, on ne peut transmettre que ce que l'on ne possède pas, contrairement à ce qui se passe lorsqu'il s'agit de la transmission de la couleur de la peau, de l'argent et des biens mesurables, quantifiables."

 

Oui, le père s'élève en élevant, apprend en apprenant, et par là même établit le seul fonctionnement qui permettra à chacun de s'épanouir pleinement. Le triangle père-mère-enfant contrebalancera le fantasme de toute-puissance de l'une, avec l'absolue nécessité de "se surpasser pour exister", de l'autre. Le tout, dans l'intérêt de l'enfant.

 

Rôle ou fonction ?

 

-" La mission paternelle se résume à sa fonction symbolique de différenciation psychologique. Elle trouble l'harmonie incestueuse entre la mère et l'enfant, introduit une coupure, une distance entre eux pour édifier le triangle.

 

Le père accompagne le petit dans son évolution pour le faire devenir grand.

 

Il l'initie à l'univers du langage, le familiarise avec le casse-tête de la différence des sexes et des générations, lui impose le respect des interdits, la soumission à la loi morale et aux règles sociales qui organisent son psychisme et qui codifient les rapports entre les humains."

 

Une présentation des rôles nous apprend que ceux-ci sont conscients et volontaires (tâches ménagères, même si celles-ci sont considérées par le père comme des corvées), qu'ils relèvent de la réalité, de choses concrètes visibles.

 

Les rôles sont nombreux et variés, et non spécifiques, interchangeables. Leur répartition hiérarchique ne peut être traduite par l'appartenance à un sexe ou à l'autre.

 

Ils sont relatifs, dépendent de la culture, de l'image d'une société.

 

Ce rôle du père est actuellement diminué par les différentes "prouesses" médicales : On ne peut plus affirmer que l'homme est indispensable dans l'acte de procréation. Son rôle s'en trouve alors très largement amoindri, négligé, voire inutile.

 

Les rôles biologiques, mais aussi économiques se trouvent placés au second plan. Le père lui, ne se réduit pas à un rôle ! Père et géniteur sont deux entités distinctes.

 

La fonction elle, est inconsciente, et psychologique. Elle est unique et absolue, spécifiquement paternelle OU maternelle. Ni le temps ni le lieu n'entrent alors en ligne de compte.

 

La fonction maternelle est ici décrite comme l'abri, la sécurité, la protection, la chaleur, la tendresse, l'affection, la fusion, la compréhension et l'amour :

 

"- Viens mon petit, ne me quitte pas. Viens te blottir dans la chaleur de mes bras. Je te satisferai avant même que tu n'aies formulé la demande. Viens te désaltérer à la fontaine chaude et généreuse de mes seins et tout ira bien. Je ferai disparaître la maladie, le désenchantement, l'ennui et la souffrance pour toi. Je t'ai aimé alors que tu n'existais pas encore. Viens mon petit. Ne t'éloigne pas, ne t'en va pas. Tu seras toujours mon petit à moi. Pour toi et moi, le temps ne passera pas. Pour toi et moi, la distance n'existe pas. Ce qui est à toi est à toi, et ce qui est à moi est à toi, mais toi tu es tout à moi."

 

Cette fonction chez la mère est inconsciente, psychologique (non visible, non mesurable), unique, spécifique ( à la femme), et absolue ( sans modification dans le temps et l'espace).

 

Il en va de même pour les caractéristiques de la fonction paternelle. Elle se traduit différemment, par une fonction de séparation, de différentiation, de distinction :

 

"- Va, va pour toi seul, hors de ton pays et du ventre maternel où tu es comme au paradis béat, sans manque et sans besoin. Sors de là, envole toi de tes propres ailes. Débrouille toi pour gagner ton pain à la sueur de ton visage. Abandonne ta maman et trouve toi une autre femme au prix de tes efforts et de ton travail. Des obstacles surgiront sur ton chemin. Tu seras seul, mais ma promesse t'accompagnera et tu les surmonteras, comme je l'ai fait moi, et nos ancêtres bien avant moi et toi. Marches et deviens."

 

Eduquer : du latin educare : faire sortir, tirer dehors. Cette fonction est dévolue au père : C'est lui qui éduque.

 

La mise en place du triangle "Père-Mère-.Enfant" (non reproductible ici) est là la fonction paternelle inconsciente et éternelle.

 

Ce triangle signifie :

 

Moi le père, je ne suis pas tout

Toi la mère, tu n'es pas tout

Il l'enfant, il n'est pas tout

 

Il signifie aussi :

 

Moi le père et toi la mère, on n'est pas tout

Toi la mère et lui l'enfant, vous n'êtes pas tout

Lui et moi, on n'est pas tout.

Pas de moi sans toi et lui

Pas de toi sans lui et moi

Pas de lui sans toi et moi.

 

Pourquoi cette fonction de séparation entre t-elle de façon si importante en ligne de compte ? L'auteur résume ce fait en trois points :

 

·        Au travers des différents étapes de l'évolution psychologique de l'enfant, l'auteur met en évidence que ce dernier ne peut grandir sans se "séparer" de sa condition actuelle ; cette séparation n'étant possible que par l'intervention de ses parents en l'occurrence :

 

C'est en écoutant parler, que l'enfant commence à former les mots. C'est en voyant les autres marcher que l'enfant se lance. Ces étapes sont à elles seules de véritables actes de séparation d'avec une condition ultérieure, mais ne peuvent être interverties ni accélérées.

"- Le fruit reste accroché à l'arbre parce qu'il est trop vert". Ce n'est qu'une fois mûr qu'il se détache de lui même.

 

Cette évolution, engendrée par ces multiples séparations fait passer d'un état de fusion/confusion, à un état d'identité propre, subjective et autonome.

 

De la naissance à l'âge adulte, la vie est une suite d'événements de séparation, de différenciation. L'évolution psychique s'accomplit alors au travers de ces différents événements.

 

"- Tout changement comporte une mort (la mort des attachements de l'enfance) et une renaissance (renaître à l'âge adulte)

 

·        Toute évolution, tout changement s'accompagne d'une régression : L'enfant devient collant parce que justement, il apprend à se décoller. C'est sa façon à lui de se séparer des liens du passé pour devenir indépendant.

 

·        L'évolution psychique se réalisera d'autant mieux qu'il prendra conscience qu'il ne peut prétendre être tout-puissant. Le manque, la frustration devront dorénavant faire partie intégrante de sa vie, les succès et les échecs ponctueront ses actions, qu'il l'accepte ou non.

 

 

Ces différents points permettent alors de comprendre que le père, de par sa fonction de séparation et de différenciation psychique, assure l'équilibre des rapports entre les individus concernés, définit le cadre dans lequel les dérives sont évitées, et permet alors au duo initial "mère-enfant" de se transformer en un triangle père-mère-enfant, apportant par là même la vie là où la fusion aurait apportée la "mort", une vie qui peut alors se targuer d'être vécue pleinement.

 

Les fonctions paternelles et maternelles, loin de s'opposer, mettent chacune en évidence leur complémentarité, loin de toute hiérarchie. L'arbre ne peut s'approcher du ciel, que s'il est d'abord bien enraciné.

 

Pour que la "loi" du père puisse être entendue par l'enfant, il faut d'abord que celui-ci soit comblé de l'amour maternel.

 

Le matriarcat revendicatif

 

L'auteur nous aide à comprendre que les trois angles du triangle sont liés l'un à l'autre : Au déséquilibre de l'un répond instantanément le déséquilibre des deux autres !

 

Les liens familiaux actuels laissent apparaître clairement ce déséquilibre : On exige de la mère qu'elle soit capable d'intégrer à la fois les deux fonctions paternelle et maternelle. Loin d'être un épanouissement pour les unes, ce renforcement d'un des côtés du triangle opère un dysfonctionnement complet du triangle.

 

Loin d'avoir voulu être écrasant, le patriarcat est tout autre :

 

"- C'était en fait précisément cela, malgré quelques dérives, indélicatesses et agressivités apparentes, la mission première, vitale, du patriarcat, malheureusement dénigré aujourd'hui, parce que incompris totalement. L'intention du patriarcat n'était nullement celle de réduire en esclavage ni d'écraser la femme, on se demanderait bien pourquoi. Au contraire, il cherchait à protéger et à sauvegarder la femme, face à la prépondérance illimitée de son désir, sauvage et tout-puissant."

 

Pourquoi une telle insistance de la mise en place de ce triangle ?

 

A vouloir trop observer séparément les trois termes, les auteurs relatifs au sujet, ont voulu voir là une victoire de l'une des parties sur l'autre. C'était scier d'avance la branche sur laquelle on est assis : Lorsque l'un dérive, l'autre se noie dira l'auteur. Les interactions sont trop importantes pour pouvoir être dissociées les unes des autres. Au final, il en résulte une aliénation encore plus grande des protagonistes, particulièrement de la femme.

 

"- Aujourd'hui la femme est omniprésente, omnisciente et omnipotente…Elle drague, fume, boit, et s'habille comme les hommes."

 

"- La femme moderne est devenue "deux en un", homme et femme, père et mère, masculin et féminin".

 

La société, la justice sont actuellement tournées en faveur de la femme : En cas de "problème", la garde n'est que très rarement confiée au père, la pension de même sera versée par le père à la mère. Elles auront alors la liberté de réorganiser la famille à leur gré.

 

Le père ne sert-il donc à rien ?

 

Selon l'auteur, la fonction paternelle doit amener la femme à plus de liberté, et non l'inverse.

 

Mais quelle liberté ?

 

La vraie liberté dira l'auteur se situe dans l'acceptation du manque ! Je ne peux être homme et femme à la fois ! Cette liberté se traduit aussi par l'acceptation de l'interdépendance de chacun des membres du triangle.

 

L'auteur décrit ce qui pourrait être considéré comme une base commune de travail, en vue d'une entente harmonieuse : L'autre est différent, cela doit servir à nous enrichir :

 

"- Ma femme n'est pas un homme, mais une femme. Elle n'appartient pas au même sexe que moi. Il est donc tout à fait normal qu'elle ressente la vie différemment. Vivre ensemble n'implique pas l'accord total, l'homogénéité absolue dans tous les domaines de la vie quotidienne, l'obligation de vibrer, de souffrir, de rire, de s'inquiéter, de penser, de jouir, de façon semblable.

 

De même le père ne peut aimer véritablement son enfant que s'il accepte de renoncer à son fantasme de maternité, que s'il reconnaît sa progéniture dans une génération différente…

 

Les confusions de sexes, de fonctions, et de générations, c'est à dire le non-respect du triangle, aboutissent toujours à la rupture et à la violence. La haine est le résultat de l'ignorance et de l'aveuglement. L'amour et la tendresse sont les fruits de la réflexion et de la connaissance."

 

La famille, d'antan à aujourd'hui

 

L'histoire de l'évolution du contexte familial montre de façon précise que chaque type d'organisation possède ou possédait ses avantages et ses inconvénients. Il est loin le temps où, la majorité des mariages était "arrangé", décidé d'avance par les deux couples parentaux. Le libre choix d'aujourd'hui garantit -il pour autant plus de joie, de plaisir. Le taux de divorce sans cesse croissant semble démontrer l'inverse. Aucun des deux fonctionnements ne peut assurer le bonheur absolu et complet.

 

Il apparaît assez clairement, que la stabilité familiale des années 50 aie procurée alors plus de sérénité qu'actuellement. Les repères, sans doute plus clairs et moins complexes, ont contribué à une meilleure identité familiale, à l'appartenance à une histoire, des racines, qui aujourd'hui passent pour être des exceptions.

 

Le modèle d'alors est-il à réinvestir ? La réponse semble se trouver dans l'équilibre et les leçons que chacune des époques peut procurer. Tout n'est pas à rejeter en bloc. Malheureusement, il semble qu'on ne sache pas faire autrement : C'est tout, ou rien !

 

Il appartiendrait plutôt, de reconnaître les dysfonctionnements, afin d'y remédier. Encore faut-il que les repères, les lois, les modes sociales soient en mesure de ne pas "truquer la donne", par crainte (d'être taxé d'intolérant), ou par conformisme.

 

La psychanalyse met à jour les "carences" du père : Même présent physiquement, son inconscient semble le conduire sur des sentiers dont il ne peut mesurer les effets, à plus ou moins long terme.

 

A travers de nombreux témoignages, Simone Nabati nous fait prendre conscience de l' impact d'une fonction paternelle dysfonctionnelle.

 

Outre les dérives plus "visibles", plus lourdes, telles l'alcoolisme, le viol ou l'inceste, toutes cataloguées comme clairement destructrices, c'est bien souvent par des constats d'une banalité déconcertante que se révèle le mauvais rapport au père.

 

Tel l'exemple D'Alexandre, enfant de 10 ans :

"… énervé et rouge de colère : depuis plus d'une heure, il s'épuise à faire des divisions et n'y arrive pas. Pourtant, c'est un garçon intelligent, rapide, brillant, mais voilà, ça "bloque" en calcul.

 

De plus, sa mère se plaint de lui : Il est jaloux, possessif et ne supporte pas qu'elle s'occupe trop de sa petite sœur. Ses parents sont divorcés depuis trois ans. Quand on lui demande où il passe ses vacances, il répond "moitié chez papa, moitié chez maman, comme ça il n'y aura pas de jaloux".

 

Alexandre n'arrive pas à faire les divisions car lui-même est obligé de se partager en deux pour ne pas qu'un de ses parents se sente délaissé. Il est devenu en quelque sorte la "moitié" de l'autre.

 

Sa déchirure intérieure, sa division psychique, source de conflits inconscients, empêche la réussite des opérations sur un plan conscient."

 

L'échec scolaire, selon l'auteur, est le domaine dans lequel se trouve concentré beaucoup de difficultés liées directement à la séparation parentale, et donc, le plus souvent, à l'absence d'une présence masculine : Censé aider à l'évolution psychique de l'enfant, sa carence ouvre la voie à l'échec, favorisant une délinquance de plus en plus marquée alors.

 

Difficile d'intégrer les apprentissages fondamentaux, quand ceux-ci réclament de la part des apprenants de se détacher d'une ancienne façon de faire, pour entrer dans l'inconnu, l'insécurisant. La carence de la fonction paternelle devient alors évidente, de par la définition qui en a été faite plus tôt.

 

La décomposition par l'auteur de l'apprentissage de la lecture est à elle seule une démonstration si besoin était, de la nécessité de la fonction paternelle.

 

"- Qu'est-ce que lire ?

Lire implique une triple opération de différenciation :

Auditive (détacher les sons)

Visuelle (détacher les lettres)

Spatiale (distinguer l'ordre de succession des lettres)."

 

Conclusion

 

Conjointement, les deux auteurs mettent en garde contre une montée du désir féminin tout puissant. Désir largement relayé par les mouvements féministes d'alors, chez qui ils reconnaissent cependant au moins deux intérêts :

 

Avoir fait bouger les choses, et réinstauré un équilibre quant au patriarcat.

 

Mais l'extrémisme dont il a été fait preuve alors a fait basculer la situation à l'opposé ! Le véritable danger qui en résulte serait de croire que les différences n'existent pas.

 

Une société sans homme provoquerait la chute même de celles qui l'auraient appelées à grands cris. La seule façon pour un homme d'être reconnu, c'est que la femme le reconnaisse !

Le désir de liberté de la femme, doit être compris à travers une complémentarité des rôles et des fonctions, à travers une reconnaissance nécessaire de l'un ET l'autre, malheureusement mise à mal de nos jours,

 

"- Les mouvements collectifs de notre modernité, en accentuant la désacralisation du père, acculé au dépôt de bilan, et en stimulant la masculinisation de la mère, nous emportent vers la régression, le chaos, l'archaïsme du matriarcat, c'est à dire, vers des lendemains qui déchantent."

 

Loin d'être un combat "homme-femme", où chacun aurait tout à perdre, Il semble plutôt que ce soit dans la reconnaissance mutuelle, dans la nécessité de l'autre que se trouve la réponse.

 

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